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Chapitre 1: Le troisième soir, par Bat.Jacl

Cette semaine, c’est le troisième soir d’affilé qu’il vient me rendre visite.


Trois soirs où ses gestes se transforment en habitudes. Une fois sous les draps, je peux apercevoir sa silhouette qui se dessine à travers la vitre. Et d’un incompréhensible mouvement de ses longs doigts disproportionnés, il déverrouille le loquet depuis l’extérieur. Le battant se tire dans sa direction. Tel un torrent au ralenti, une de ses jambes jaillit dans la chambre en silence. Et avec la plus grande précaution, il la suit et traverse l’encadrement de la fenêtre. En équilibre sur ces jambes démesurées et sur sa canne de belle facture, il ondule avec délicatesse. Le buste en avant, tel un serpent.


Je me sens hypnotisé par son large sourire. Une de ses mains reste immobile par rapport à son corps, prenant soin de maintenir son haut de forme sur sa tête. Une fois entièrement dans la chambre, il se redresse, se déploie de tout son long. Il est si long et filiforme, à tel point qu’il est obligé de se courber en avant pour que son chapeau ne heurte pas le plafond. Ses grands yeux statiques me fixent sans cesse, à chacun de ses lents mouvements. Une de ses mains fond derrière lui, et referme la fenêtre sans aucun claquement.


Sans regarder son costard couleur olive, il réajuste son veston au niveau de son torse et resserre légèrement son nœud de cravate. D’un geste sec et nonchalant, il brusque son couvre-chef, créant un nuage de poussière, vite dissipé. Puis, il le redépose avec délicatesse sur sa tête. Première fois qu’il détourne les yeux de mon visage, pour voir sa place qui l’attend à l’autre bout de la pièce : une ancienne chaise grossièrement retapée qui me servait habituellement pour poser mes vêtements de la veille. Mais depuis quelques jours, j’ai tendance à la vider avant de me coucher.


D’un seul énorme pas, il traverse ma chambre en se contorsionnant et s’assoit dans le rocking-chair. Comme s’il pesait moins d’une plume, elle ne fit aucun mouvement de balancier. Son sourire aux dents longues et fines semble s’étirer encore plus lorsqu’il prend place face à moi. Jambes croisées et bras tendus le long des accoudoirs, son regard ne cesse de me dévorer. Ses deux yeux complètement noirs ne reflètent aucune émotion. Bien que ce soir là, la lune leur donne une étrange clarté. Comme les soirs précédents, une nuit des plus paisibles s’annonce. Une nuit d’un noir d’obsidienne, ou les rayons de lune ne parviennent pas à effleurer les paupières de mes yeux. Une nuit d’un silence abyssal, ou le sifflement du vent ne brusquera pas la fragilité de mes tympans. Une nuit de doux songes, ou les plus merveilleuses des choses s’accomplissent dans mes rêves. Une nuit d’un calme reposant, ou son sourire me fera oublier le plus infime de mes soucis. Et dans quelques heures, mon réveil sonnera et je me lèverais avec une forme qui m’est bien étrangère, mais tellement revigorante. Mais il ne sera plus là.


Je sais que n’importe qui aurait eu peur, ou ce serait posé des dizaines de questions destinées à être sans réponses. Certains n’auraient même pas pu concevoir ce que je voyais, ce qu’il m’arrivait. Mais à croire que je ne suis pas n’importe qui…Pas une seule fois, je n’ai été gagné par la peur. Pas une seule fois, je me suis imaginé le chasser de chez moi. Dès le premier soir, j’avais accepté cette étrange présence. Et le plus sereinement du monde, je m’étais endormi. Mais pas ce soir.


Non !


Je me dois d’agir.


Je ne peux pas me permettre autant de passivité… une nouvelle fois. Je me sens vraiment mal à son propos. J’ai l’impression qu’il me donne… sans comprendre exactement ce qu’il me donne. Une forme de tranquillité d’esprit ?


Mais je dois savoir ce qu’il attend de moi avant de l’accepter de manière aussi récurrente. Je ne peux plus continuer de prendre, sans savoir ce qu’il veut de moi en retour. En me redressant pour me mettre en tailleur sur mon lit, j’inspire profondément avant de commencer la discussion. Et comme s’il me connaissait parfaitement, au point de prévoir chacun de mes agissements : depuis la chaise, il se penche dans ma direction tandis qu’aucun son n’est sorti de ma bouche, déjà prêt à me répondre.


– Qu’attendez-vous de moi ? le questionnais-je avec discrétion.


J’ai tout sauf envie de réveiller mes parents à cette heure de la nuit. Sa tête vacille sur un côté, puis se remet en place dans un craquement d’os. Son sourire ne part pas pour autant de son visage.


– Plus de clarté, exprime-toi mieux !


C’est la première fois que j’entends sa voix. Elle est aiguë, stridente et nasillarde. Mais bizarrement, elle parut apaisante à mes oreilles.


– Que… qu’est ce que je peux faire pour vous ? dis-je en essayant maladroitement de développer ma pensée.


Et alors, sa bouche s’écartèle encore plus qu’elle ne l’est déjà. Comme dans un déchirement de la réalité que je ne pouvais pas concevoir : l’espace d’un instant, il me semble que son sourire est plus grand que son visage.


– Tu m’offres le gîte pour la nuit, et de surcroît tu devrais me rendre un service ? Sois un peu logique, voyons. Je pense même que ça devrait être à moi de t’accorder une faveur. Imagine immense, merveilleux ! Au-delà des contraintes physiques, et dis-moi ce que tu désires !


Sa phrase eut l’effet d’un coup de massue.


Je ne m’attendais pas à cette réponse. Et dans un second temps, je prends conscience de toute la portée de sa phrase. Mes pupilles se dilatent. Je sens mon intérieur qui bouillonne devant les possibilités qui s’offrent à moi. Car oui, je le crois bien capable de transgresser la réalité. Et si ce qu’il me dit est vrai, je vais pouvoir accéder à une infime partie de son pouvoir. Dans mon cerveau, les images se succèdent à une vitesse incroyable, à tel point que je ressens le mal de mer, emporté par ce torrent. Encore réveillé, je me surprends à rêver d’ajouter la petite étincelle qui manque à ma vie. Et avec une expression compatissante sur le visage, il m’adresse la parole une dernière fois cette nuit.


– Maintenant, dis-moi ! Que veux-tu ?




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