Confucius ? Confusions !, par Wargen

Une longue plainte sort du buste incommensurable de la Bête, qui se met à gesticuler la tête de gauche à droite, les mains toujours posées sur ses tempes. Herta se re…




Chapitre 14: Nains, faux, maniaques, par Wargen

Quelques secondes s'écoulent, chacun immobiles, le temps que mes paupières retombent légèrement et que ma mâchoire reprenne sa position normale. Je bafouille :
- Qui... Qui êtes-vous ?
Le petit homme au centre fait deux pas en avant, rompant l'alignement.
- Nous sommes des nains. Les sept nains. Moi, c'est Prof, pour vous servir.
Il accompagne sa voix doctorale d'un salut d’une pirouette en avant.
- Et voici Grincheux.
Il indique le nain directement à sa gauche, qui s'avance à sa hauteur, exécute un petit salut accompagné d'un « b'jour » de sa voix grincheuse. Prof reprend, montrant le nain directement à sa droite :
- Atchoum.
Celui-ci s'avance à son tour :
- Sal...saa...saaaaatcha !
Un filet de morve vient se coller à son manteau. Prof indique le nain à gauche de Grincheux :
- Joyeux.
Le nain s'avance, un grand sourire aux lèvres, et dit, d'une voix aiguë et joyeuse :
- Bonjour, belle demoiselle !
Prof reprend, le doigt pointé sur le nain à droite d'Atchoum :
- Dormeur.
Celui-ci ne bouge pas. Il semble somnoler. Atchoum lui donne un coup de coude, ce qui le fait sursauter et s'avancer. Il baille un grand « Bonjour », puis ses paupières semblent retomber lentement.
- Et voici Timide ! dit Prof en indiquant le nain le plus à gauche.
Le nain s'avance en rougissant et tremblant.
- Bon...Bon...Bon...
- On va pas y passer quinze ans ! grommelle Grincheux.
-...bonjour ! arrive enfin à bredouiller Timide.
- Et le dernier, là-bas, c'est Simplet.
Celui-ci s'avance en sautillant, se mettant un pas devant la nouvelle ligne.
- C'est moi ! s’exclame-t-il d'une voix simplette.
 
Le temps de tout digérer, je reprends la parole :
-Mais... qui... qui êtes-vous ?
Prof penche la tête sur un côté, un léger sourire au coin des lèvres :
-Je crois que vous vous répétez, jeune demoiselle. A moins que vous ne vouliez savoir ce que nous sommes, ou plutôt faisons, ici, présentement, dans ce château.
-Oui... oui... c'est ce que je voulais dire.
-Je vais vous le dire, jeune demoiselle. Mais sachez néanmoins que la bienséance voudrait que vous vous présentiez également.
Je rougis instantanément, reprenant la parole d'une voix peu assurée :
-Je m'appelle Eden, et je viens de Thiercelieux. Et voici...
Me tournant en direction du chaperon rouge à ma droite, je me rends soudain compte qu'ils ne peuvent la voir. Je rattrape le coup en me tournant vers le corps d'Herta, dans mon dos :
-...Herta, qui vient du même village que moi.
Puis, indiquant le crapaud qui s'est reperché sur mon épaule sans que je ne m'en rende compte :
-Et, voici...
-On sait qui c'est ! me coupe un nain que je n'arrive pas à identifier.
-Et donc...
-Et donc, qui sommes-nous ? me coupe Prof. « Une bande de nain. Une vieille bande de nain. Et que faisons-nous ici ? Nous sommes les serviteurs... »
-Les larbins !
Encore un nain que je ne peux identifier.
-... du maitre...
-Ex-maitre !
Encore une interruption d'origine inconnue qui fait s'agiter le crapaud sur mon épaule. Prof, qui semble s'écouter parler, n'a pas entendu et continue son monologue.
-...et l'assistons dans des tâches domestiques diverses et variées. En échange, nous bénéficions d'une protection...
-Et maint'nant ?
Encore une voix sur laquelle je ne peux mettre de nom.
-..., du droit d'aller et venir dans le château...
-Des prisonniers !
-..., du logement, du couvert...
-Si on s'cuisine not’ bouffe !
-...et d'utiliser dans des pièces attitrées des matériaux spécifiques que nous procure le maître...
-Pourriture !
Le crapaud gesticule.
-...pour nos expériences. Car, voyez-vous, jeune demoiselle, au-delà de notre état de nain, nous possédons un grand nombre de compétences.
-On est exploités !
-Nous sommes géologues, chimistes, biologistes, d'autres choses, mais avant et par-dessus tout, inventeurs.
-De génie !
-Et, pour la petite histoire, c'est lors d'une exploration souterraine que le Maître nous a sauvé d'une situation malencontr...
Cette fois-ci, Grincheux s’avance au droit de Prof :
-Chef, si vous vous lancez dans toute l'histoire, on va y passer deux plombes, et on n’pourra plus sauver Herta !
Prof se tourne vers son interlocuteur :
-Tu as raison, Grinch'.
Enfin quelqu'un pour l'arrêter !
Tais-toi, toi !
Puis, revenant dans ma direction, il reprend :
-Voyez-vous, jeune demoiselle, une de nos belles inventions pourrait servir dans le cas présent. Nous avons bâti un sarcophage en verre amélioré, que nous espérons thanatonique. Il permet de conserver la chair de toute décomposition et pourrait, si cela fonctionne, réparer les tissus organiques, les fractures et déformations osseuses et, nous l'espérons, même si nous n'avons pas encore eu l'occasion de le tester jusqu'à présent, les lésions nerveuses et les synapses. Je vois, à vos grands yeux, que vous ne comprenez goutte à mes paroles. Pour faire plus clair, nous pensons avoir créé un sarcophage permettant de faire revenir les morts à la vie. Et nous pensons qu'il est intéressant de l'inaugurer ici. Mais il faut aller vite avant que les nécroses s'installent. Cependant, nous avons besoin de votre accord préalable...
 
 
-Croâââ ! croasse le crapaud.
Avec tout ce qu'elle t'a fait ! Laisse-la crever !
Tais-toi, toi. Elle peut toujours nous servir, non ?
-Je ne sais qu'en penser.
Le chaperon rouge me sort de mon dialogue intérieur.
-Qu'auriez-vous à y perdre ? me sourit Prof.
-Je...
-Il va peut-être falloir se décider, ma belle. » Le chaperon rouge.
-Sinon, il faudra que vous nous débarrassiez du corps... » Le sourire de Prof a un je ne sais quoi que ne me plaît guère.
Je prends une grande inspiration, et expire longuement en décidant du sort d'Herta.
-C'est bon, allez-y, mettez là dans votre sarcophage tatamonique.
-Thanatonique. Vous avez fait le bon choix, jeune demoiselle !
 
Comme si ma parole était divine, elle crée le mouvement là où il n'y avait qu'immobilité : un flot de nains, de sept nains en l'occurrence, se précipite sur le corps inerte d'Herta dans un déchaînement frénétique, me frôlant et poussant sauvagement. Reprenant doucement mes esprits, le temps que le corps d'Herta disparaisse petit à petit sous un amoncellement de manteaux jaunes et bonnets en tissus bleus, je lâche :
-Mais... mais que faites-vous ?
Le corps d'Herta est maintenant invisible à mes yeux sous cette masse d'habits mouvants.
La voix doctorale de Prof émerge du tas :
-Il faut que nous soyons sûr de la fraîcheur du corps pour savoir si nous pouvons le reprendre. Notre invention semble assez exigeante, et nous sommes perfectionnistes. Nous voulons réussir notre essai.
Le tas jaune et bleu devant mes yeux bouge, tremble, se meut comme s’il ne faisait maintenant plus qu’un organisme vivant unique. Cela semble trop déroutant à mes yeux :
-Vous… vous êtes sûr ?
La voix grinçante de Grincheux :
-Ouai qu’on est sûr ! D’ailleurs, Dormeur, r’ga’de bien à l’entrejambe !
Mes yeux s’écarquillent.
-A l’entrejambe ? » Le chaperon rouge me fait sursauter. « Bizarre, ça ! »
Pensant la même chose qu’elle, je m’approche du tas gesticulant. Les bonnets bleus se dandinent devant mes yeux, tandis que je tente de me pencher au-dessus. Sans succès. Contournant le tas, je me dirige vers là où il me semblait que se trouvaient les jambes d’Herta. Qui dépassent en effet de part et d’autre d’un nain situé devant l’entrejambe du corps inerte. Son manteau jaune est ouvert, laissant paraître une énorme masse oblongue beige parsemée de ridules violacée au cheminement erratique, et surplombée d’une sorte de large chapeau de chair rouge sang accompagné d’une fente au sommet. Un sexe. Un sexe monstrueusement grand et difforme compte tenu de la taille de son possesseur. Un sexe qu’il abaisse pour tenter de l’enfourner dans celui ouvert du corps inerte d’Herta. Cette vision d’horreur me fait hurler tandis que je pousse le nain en arrière. Celui-ci, tombé à la renverse sur le cul, me regarde d’un air hébété, tandis que son engin perd doucement de sa superbe. J’entends des frôlements d’habit derrière moi et, me tournant, vois un nain enlevant rapidement sa main du mamelon droit d’Herta, tandis qu’un autre, en face, semblant dans son monde, continue de pétrir violemment l’autre sein. Ma main part en direction de son visage, le faisant reconnecter à la réalité, mais j’ai quand même eu le temps d’apercevoir, dans mon mouvement, un nain du côté de la tête qui referme la bouche d’Herta. Et tente de dissimuler maladroitement son sexe en érection sous son manteau jaune. Je ne peux me retenir, et hurle :
-MAIS QU’EST-CE QU’IL SE PASSE ICI ?!?
Un nain tenant la main gauche d’Herta posée sur son ventre, que je reconnais comme étant Prof de par sa voix doctorale, bredouille :
-Nous… nous… nous devons l’ausculter, pour voir…
-RIEN DU TOUT ! PAS D’AUSCULTATION, BANDE DE PERVERS ! VOUS SAVEZ AUSSI BIEN QUE MOI QU’ELLE EST COMME CA DEPUIS PEU ! AMENEZ LA A VOTRE FICHU SARCOPHAGE !
Les nains s’écartent en bougonnant du corps d’Herta en grande partie défroqué. Prof se lamente :
-Il fallait nous assurer… Et en plus, cela fait longtemps que nous sommes aux services du maitre. Et nous n’avons jamais eu le droit de…
Voyant qu’il s’interrompt, une voix émerge du tas de nain :
-Ouai, ça fait longtemps qu’on n’a pas tiré not’ coup !
Un autre :
-Y a personne qui n’vient jamais par ici !
Un troisième :
-Franchement, c’est dur, même pour moi !
Prof, ayant repris ces esprits, se tourne vers moi, un petit sourire aux lèvres :
-Mademoiselle, étant donné le service que nous proposons, il est bien normal de réclamer un dû. Rien n’est gratuit en ce bas monde, et l’utilisation de notre technologie doit faire l’objet d’un paiement, qu’il soit en espèces sonnantes et trébuchantes ou en nature. Herta peut bien payer de sa personne, si cela doit la sauver. De plus, dans son état, notez bien qu’elle ne devrait rien sentir.
Ses yeux plissés grand ouverts me scrutent attentivement, devenant légèrement libidineux :
-D’ailleurs, je trouve que le prix que nous vous accordons est très généreux. Je suis d’avis qu’il faille que vous donniez un peu du vôtre, ma jeune amie. Parce que bon, quand même, c’est plus intéressant quand ça bouge et qu’il y a du répondant.
 
 
Je le regarde, éberluée. Une voix fuse de derrière :
-C’est bin vrai, ça !
Je fais un pas en arrière. Les nains, qui se sont reformés en ligne devant moi, avancent d’un pas, Prof au centre :
-Franchement, jeune demoiselle, qu’auriez-vous à y perdre…
Je fais deux pas en arrière, tandis que les nains en font autant en avant, les extrémités de la ligne se refermant plus vite pour former un arc de cercle. Grincheux :
-Ouai, j’suis sûr qu’tu vas prendre ton pied, cocotte !
Je sens la présence rassurante du crapaud sur mon épaule. Trois pas chacun dans la même direction. Le chaperon rouge :
-Eden, je ne le sens pas trop, là.
Je suis d’accord avec elle.
Moi aussi.
D’un même bond, les nains s’élancent dans ma direction. Je pivote et me mets à courir vers la balustrade. Je renverse une caisse de vêtements par terre et entends des jurons et des bruits de chute.
-Prends à droite ! me crie le Chaperon rouge.
Dans la précipitation, je tourne à gauche. Le couloir continue sur quelques mètres, avant de se terminer sur de profondes et larges marches d’escalier qui s’enroulent doucement en montant autour de la tour principale du château. Le mur plein venant remplacer le balcon obscurcit l’entrée de l’escalier, mais des meurtrières laissent tout de même passer des raies rouges en provenance de la lune. J’hésite quelques secondes, mais la voix impérieuse de Prof me pousse en avant :
-Dormeur, Simplet, Timide, Atchoum…. Non, pas Atchoum, Joyeux ! Vous prenez Herta et l’installez dans le sarcophage. Je prends l’escalier extérieur…
J’entends une voix grinçante se lamenter que c’est pile celui que je viens de prendre.
-Grincheux, ne discute pas ! Prend l’escalier intérieur, tu iras plus vite ! Atchoum, prend le passage secret ! Les autres, une fois….
Ses paroles se perdent tandis que je continue mon ascension. La tour doit être grande, l’escalier tournant très lentement autour. J’atteins l’étage du dessus, qui présente le même couloir balcon que celui que je viens de quitter. Un coup d’œil à gauche, je devine une porte donnant sur l’intérieur de la tour. Je continue tout droit et enchaine le nouvel escalier qui monte vers l’étage supérieur. Dans mon dos, j’entends le souffle ahanant de Prof qui semble avoir du mal à grimper rapidement ces marches trop profondes pour son petit corps difforme. Un nouveau palier avec un couloir balustrade, une nouvelle pièce sombre à gauche, un nouvel escalier montant en face. Je décide de m’arrêter ici et d’explorer la sombre pièce à gauche.
-Fais attention, essaye de ne pas faire de bruit ! me glisse le Chaperon rouge.
Je susurre un « oui ».
-Croâââ ?
Je sursaute et, dans le même mouvement que le Chaperon rouge, pose mon index sur ma bouche, accompagné d’un léger « Chut ! » pour intimer le silence au crapaud. En tâtonnant dans le noir, je pose la main sur une étagère avec de petits outils métalliques, une table centrale en partie couverte d’une substance poudreuse, un large rebord en pierres massives semblant former un demi-cercle.
Un four.
Une cuisine.
J’ai l’impression, oui.
Chut !
Je m’immobilise soudain, entendant des geignements essoufflés venant de l’extérieur.
-Mais où est-ce… qu’elle est allé,… cette petite peste ?
Prof !
-Elle a due… encore monter… Plus que quatre… étages et elle… est coincée !
Je vois sa forme éclairée par les rayons de lune rouge traverser mon champ de vision à travers le pas de la porte.
-A moi son vagin… humide !
Il disparait de ma vue, et je l’entends attaquer l’ascension du prochain étage en soufflant. Laissant passer quelques secondes, ou quelques minutes, je ne saurais dire dans cette obscurité incertaine, je continue l’inspection hasardeuse de la pièce. Des étagères avec des ingrédients, des jarres contenant des liquides, des ustensiles de cuisine et de ménage accrochés à des patères. Mon auriculaire gauche se coupe sur un objet tranchant.
-Aïe !
-CHUT ! me hurle le Chaperon rouge.
-Je me suis faite mal ! me plains-je dans un souffle léger.
Je tâtonne dans la direction de l’objet en question, et vois qu’il s’agit d’un couteau pointu et tranchant. Sans réfléchir, je le prends, et le glisse à ma ceinture, sous ma cape dont la couleur rouge est totalement aspirée dans cette obscurité.
-Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? demande-je au chaperon rouge.
-Je ne sais…
-Croâââ ?
Le faible croassement s’amplifie et résonne dans la cuisine.
-Mais elle va la fermer cette sale bête !
La virulence du ton du Chaperon rouge me fait sursauter. Je reprends en susurrant à l’attention du crapaud :
-Ce n’est pas à toi que je parle, gentil petit crapaud, mais à quelqu’un que tu ne peux voir ni entendre. Alors, quand je parle, ne réagit pas.
Une main me tape le postérieur, accompagné d’une voix grinçante :
-J’aime quand tu susurres comme ça, salope !
Grincheux !
Je donne un coup de pied en arrière et entends un gémissement qui indique que j’ai fait mouche. Je me précipite vers la porte, la traverse, atteint la moitié du chemin vers le balcon avant de me prendre les pieds dans ma cape et de tomber à la renverse.
 
 
Reprenant mes esprits, je me tourne en direction de la porte, et vois Grincheux s’avancer dans ma direction, un sourire carnassier aux lèvres, son énorme sexe sortit et dressé dans ma direction.
-Relève toi, viiite ! me conjure le Chaperon rouge.
Pétrifiée, je n'arrive pas à bouger. Mon cerveau est bloqué. Le satyre, devant moi, avance lentement, d'une démarche triomphante. Il semble avoir compris l'emprise qu'il a sur moi, ce qui décuple son envie et sa verge. Alors que le bout rouge et visqueux s'approche de mon visage, je trouve enfin le moyen de crier de terreur. Un hurlement suraigu qui se répercute dans tout le château et la lande alentour. Le nain sursaute légèrement, son sexe ripant sur mon menton. Je ferme les yeux, des larmes commençant à ruisseler tout doucement le long de mes joues. J’entends le chaperon rouge me supplier :
-Eden ! fais quelque chose ! Bouge ! Bas-toi !
Je sens l'objet de chair se frotter contre ma joue. Grincheux rigole d'une voix démentielle. Je me mets à sangloter. Le rire du nain est maintenant total. Je sens son bout chaud qui se glisse entre ma joue et la capuchon, en direction de mon oreille. Il exulte. Son ton est celui de la jouissance complète. Jouissance... qui change subitement de registre. Pour aller vers la surprise. Et l'horreur. Je rouvre les yeux pour voir le crapaud accroché au visage du nain. Une sorte de nuage de gaz et de bulles semble suinter du corps de l'amphibien. Il saute dans le cou du nain, laissant apparaître un visage sanguinolent parcheminé de cloques. Grincheux s'effondre à genoux, portant ses deux mains à son visage, poussant un râle de douleur. Son sexe pend mollement entre ses jambes, ayant perdu les neuf-dixième de son ancien volume. Il hurle de douleur. « J'brûle ! J'fonds! Au s'cour ! » Le crapaud rampe jusqu'en bas du dos du nain, laissant apparaître l'os des vertèbres, la chair en train de fondre et un bout de manteau en train de fumer. Le nain menace de tomber en avant. J'ai à peine le temps de me reculer qu'il s'effondre à plat ventre devant moi. Il est pris de spasmes, son sphincter évacuant l'ensemble de ses intestins par le trou anal agrandis par l'action brûlante des miasmes sortant de la peau du crapaud. Un dernier spasme, un dernier vomissement, et Grincheux ne bouge plus. Un liquide blanc coule lentement de son entrejambe.
 
Un certain temps passe. Je suis perdue.
-J'ai cru entendre des voix dans l'escalier extérieur, il ne faut pas rester là !
Le chaperon rouge ! Je me relève, tant bien que mal. Évitant le corps fumant du nain et les fluides qui en sont sortis, je me dirige, titubante, vers la cuisine. Je m'appuie contre la table. Je suis prise de vertiges. Je sens une pression mal assurée sur mon épaule. Le crapaud vient de s'y renicher pataudement.
-Je te remercie, gentil petit crapaud.
-Croâââ...
Son croassement est faible. Comme s'il avait perdu de sa vitalité. Le chaperon rouge me fait remarquer qu'il semble un peu épuisé.
-Tu es fatigué ?
-Croââ.
-Vidé ?
-Croâ.
Je me tourne vers le chaperon rouge.
-Tu as rais...
Elle fait un geste m'intimant de me taire. Des voix se rapprochent de l'extérieur et l'intérieur. Je m’inquiète :
-Ils arrivent. Ils sont au moins trois. Qu'est-ce qu'on...
Le chaperon rouge met son doigt devant sa bouche.
-Chut ! J'écoute ce que Timmy et Mary me disent.
-Timmy et Mary ?
-La tasse et la théière.
La tête me tourne.
-Ils disent qu'il y a un passage secret. Viens par ici.
Je m'oriente à la voix du chaperon rouge. Celle de Prof se fait entendre, de l'autre côté :
-Simplet ! Où sont les autres ?
Je rejoins le chaperon rouge.
-Moi, je suis là !
Elle me demande d'appuyer sur deux pierres sur le côté de la cheminée
-Et les autres ?
Un léger vrombissement sourd se fait entendre.
-Dormeur s'est endormi, Joyeux a rejoint l'escalier intérieur et Atchoum le passage secret. Et moi, je suis là !
Le mur devant moi semble pivoter, m’entraînant doucement.
-Par la Sainte Pioche ! Regarde l'état de Grinch’ !
Je suis le sol sous mes pieds qui tourne avec le mur.
-Moi, j'aimerais pas êt'e comme lui !
-Ça veut dire que la petite chatte est dans la cuis...
Le mur se referme après un demi-tour complet, coupant net les sons. Nous nous trouvons dans le noir et le silence absolu. Les mains en avant, je touche une colonne en pierre quelques dizaines de centimètre à peine devant moi. La main gauche sur la colonne, la droite sur le mur, j’avance prudemment. Pied droit. Le mur, à droite, semble s’incurver. Pied gauche. Il s’incurve maintenant très vite. Pied…vide ! Sur quelques centimètres.
Une marche ?
Un escalier en colimaçon.
Une autre marche. Je chuchote, à l’attention du Chaperon rouge :
-Tu es là ?
Elle me répond, dans un souffle :
-Oui, derrière toi.
-Tu me vois ?
-Oui, pourquoi ? Tu ne me vois pas ?
-Vu le noir complet, je ne vois rien.
-Ah…
-Tu sais, tu n’es pas obligée de chuchoter, toi.
-Ah oui, c’est vrai ! me répond-elle. Je devine son sourire au ton employé.
-Comment est-ce que ça se fait que tu y vo…
Un vrombissement sourd me coupe le sifflet.
 
 
Le chaperon rouge me fait sursauter :
-On n’est pas seul.
Deux voix semblent venir de plus bas, ricochant sur les parois de l’escalier.
-Avec ça, on y verra mieux !
-Bonne idée, Atchoum ! J’avais trop peur, moi, dans l’noir !
-Je pars en éclaireuse ! » Ne la voyant pas, j’imagine que le chaperon rouge commence à descendre.
-J’espère qu’on s’ra les premiers sur elle, j’aime pas quand quelqu’un est passé avant moi.
-Franchement, y a mieux à faire avec Herta.
-Tu trouves ?
-J'aime bien quand on peut s'accrocher un peu. L'aut', c'est une crevette.
-ILS ONT UNE TORCHE !
Le hurlement du chaperon rouge me fait sursauter.
-Moi, j'aime bien sa...
-Oh ! La flamme a vibré ! Fait gaffe, que ça s’éteigne pas.
-J’ai senti comme truc froid sur mon corps.
-JE PEUX PASSER A TRAVERS EUX ! CA A L’AIR DE FAIRE COMME UN COURANT D’AIR ! JE REESSAYE !
-Brrr… Froid.
-Oui, ça…ça… çAAATCHA !
-MERDE, la torche !
-Putain, on n’voit pus rien !
-J’ai peur !
-T’inquiète, Timide ! Fait comme moi, prend appui des deux côtés, et monte petit à petit. C’est trop étroit, rien n’pourra nous passer à travers.
-ILS MONTENT, JE LES SUIS.
-T’as raison, c’est facile, en fait. Une marche. Et encore une. Je ferme les yeux, c’est plus… aïe !
-Fais gaffe à mes fesses ! Tu va trop vite, prend ton temps.
-J’ai butté contre une marche.
-J'ai senti ! Mais moi, c’est contre ses fesses que j’aimerais bien butter.
-SOIS PRETE A DONNER UN BON COUP DE PIED EN AVANT QUAND JE TE LE DIT !
-Contre les fesses de qui ? Eden ou Herta ?
-Les premières que je trouve. Celles d’Eden, alors.
-Contre ses fesses, mais dans son vagin, ou dans son cul ?
-Dans les deux, mon gars ! Un coup d’un côté, un coup de l’autre, ça s’en va et ça…ça…çAAAATCHA ! Sniiirfl !
-ILS DEVRAIENT BIENTOT ARRIVER !
La tension monte soudainement en moi. Je m’assieds sur une marche, le dos calé contre la marche derrière, les jambes repliées vers moi.
-Pfuuh, c’est rude quand même, cette montée.
-Pense a... pfuuuh… pense avec ta bite.
-Ouai, t’as raison, Atchoum !
-Oh !
-Quoi ?
Je sens une forme grassouillette venir appuyer sur la plante de mes pieds.
-VAS-Y, DONNE TOUT !
En réponse, je détends mes jambes le plus violemment possible.
-Ahhh !
-Aaaaaaaahh !
-Attention, tu m'renver...
-Aïe !
-Ouille !
-Putain, ça fait...
Dans le noir, j'entends deux masses qui tombent et culbuttent.
-Aïe... Ouille... Aïe...
-Je... Aïe... Je
Craac
Bizarre, comme bruit, comme un os qui craque.
-J'me suis arrê...
La voix de Timide s'interrompt comme elle a débuté, dans un bruit de percussion de corps et de craquement d'os.
-Atchoum, ...bouge toi d'là, ...tu m'a transperçé... l'bide. Je me vide ! C'est... dégueu... lasse. T'es... trop... lourd... j'arr...
Plus rien. C'est horrible, cette obscurité.
-JE CROIS QU'ILS ONT EU LEUR COMPTE !
Le chaperon rouge me fait encore sursauter.
-ATCHOUM A LA NUQUE BRISEE, ET SON COUDE A TRANSPERCE LE VENTRE ET LE COEUR DE TIMIDE. C'EST PAS BEAU A VOIR.
J'ai pas envie de voir.
Moi non plus.
-REJOINS MOI EN BAS !
-J'ARRIVE !
Main gauche contre la colonne, mains droite contre le mur, je débute la descente. Dans cette obscurité oppressante, je perds vite le décompte des marches.
-Fais attention aux corps devant toi.
Mon pied droit butte dans une masse invisible.
-A priori, d'après Timmy, il y aurait une sortie du passage secret dans le coin.




Nains, faux, maniaques 2, par Wargen

La plateforme d’accès au passage secret a fini son demi-tour complet. Je me tourne pour m’apercevoir que nous avons débarqué dans un sombre et petit couloir bas de pl…