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La fraîcheur de la soirée chasse peu à peu la chaleur orangée que les derniers rayons de soleil posent sur les arbres. La brise danse entre mes cheveux, murmurant des messages dans une langue que nous, humains, avons depuis longtemps oublié. Alors que la providence me mène à travers chemins et sous-bois, un éclat attire mon regard. Simple goutte d’eau à l’extrémité d’une feuille, son reflet brillant ravive en mon âme un coin trop longtemps laissé en sommeil. Est-ce l’isolement qui ressuscite un instinct animal ou simple rêverie éphémère que les eaux de la clepsydre viendront éroder d’ici peu ?
Je m’approche. Comme la pie voleuse, la tentation est trop grande, je ne parviens pas à ne toucher qu’avec les yeux. La goutte s’échappe lorsque je l’approche, mais au lieu de tomber, elle s’arrête en l’air, là au niveau de ma hanche. Une décharge stimule ma moelle épinière de bas en haut, comme un éclair qui retournerait du sol se dérober dans le ciel sans nuage.
La goutte se met à remonter, les arbres à rétrécir, comme des vieillards qui se faneraient sur leurs canes ou plutôt des nourrissons revenant au quatre pattes. Il retournent au sol, comme nous le ferons tous un jour, mais leur course inversée s’accélère tandis que dans le ciel le Soleil tourne dans une folle farandole ou un tango avec la lune. Les teintes orangées envahissent le paysage dorant les blés des champs environnants. La forêt a disparu, mais les collines éternelles restent solidement attachées au paysage. Le fond du ruisseau qui s’écoule en arrière-plan, ne semble plus aussi creusé. La vase s’y est-elle déposée par un ralentissement des flots, ou comme guidés par l’injustice de leur destin les minéraux sont-ils revenu occuper leur position d'origine pour se retrouver tel une réunion d'anciens du lycée ? Dans le champs en face, entouré d’herbes hautes, un homme laboure. Aux alentours, plus de village, juste un clocher, plus de route, que des chemins, plus de communauté, rien que la nature à conquérir à l’aide d’un cheval de bat et de sa charrue.
Nous nous fixons un moment, suspendu dans le temps, lui hier, moi aujourd'hui. Enfin, je n’en serai jamais vraiment certain, car je ne sais pas s’il me voit. Puis, le labeur l’appelant, peu curieux de cet étranger qui a le temps de se promener, il se mouche dans une manche mal découpée noircie par la poussière, replace son chapeau plat et tâte le cou de son collègue équin qui reprend la route. Je reste un instant stupéfait devant le paysage qui revêt dans ma tête des allures de sépia. L’apparition s’éloigne, j’hésite un instant puis avance dans ses pas, mais le soleil reprend sa course. Quand serais-je demain ?