Le fossile et la feignasse

Titre : La dame en noire (The Woman in Black)

Genre : épouvante ; horreur ; thriller

Réalisation : James Watkins

Scénario : Jane Goldman

Acteurs principaux…

— Mais pas ça, DOT…

— Tu as. dit les. infos du DVD.

— Allez, fais pas l’idiot, sinon le fossile va nous faire la misère.

Ça devait bien la faire marrer de me faire perdre mon temps. Que je vienne lui demander à elle, avant d’avoir les résultats de l’équipe scientifique, devait sonner comme un aveu de faiblesse.

Ou alors ils se vengeaient parce que comme je ne m’en sortais vraiment pas avec leurs histoires de pièces jointes et de messages transférés, je leur avais demandé de venir dans les locaux me montrer leurs résultats de visu alors que la nuit était déjà tombée.

N’empêche qu’il fallait qu’on coince ce tordu. Au nom de la sécurité de la population mais aussi pour nos agents du D.E.M.O.N qui risquent leur peau. Le meurtre d’un agent n’est ni plus ni moins qu’une attaque personnelle contre le Département.

De tout ce qu’on avait déniché chez le gamin, le DVD était clairement ce qu’il y avait de plus suspect, puisque vraisemblablement en provenance d’une source extérieure. Et puis, mon flair me disait que c’était une piste viable. Je ne sais peut-être pas utiliser tous ces gadgets technologiques, là, mais bien mon flair.

Admirez un vieux de la vieille qui a de la bouteille.

— Voici. les résultats des. traces ADN. trouvées sur le DVD.

La feignasse décala sa chaise de bureau pour que je regarde l’écran où il y avait des infos sur un de nos agents, le bleu qui s’était fait tuer.

Prénom : Sylvain.

Nom : Noyer.

Date de naissance : 21/03/2002 (22 ans).

Groupe sanguin : B+.

Taille : 177 cm.

Poids : 72,6 Kg.

— Eh bah c’est logique qu’il y ait son ADN dessus si on l’a trouvé chez lui.

La feignasse soupira à nouveau, empoigna la souris, fit glisser son doigt sur la roulette, et je lus :

Prénom : Carrie.

Nom : Hermann.

Date de naissance : 05/02/2002 (23 ans).

Groupe sanguin : O-.

Taille : 168 cm.

Poids : 44,3 Kg.

Alors que la feignasse avait lâché la souris, l’écran défilait tout seul sur tout un tas d’infos que je ne souhaitais pas savoir (ses mensurations ? non mais oh, tu me prends pour qui espèce de… de… tas de pixels !). Si son démon avait regroupé toutes ces infos si vite, ça voulait dire que cette petite était aussi un de nos agents.

Sauf que la quantité d’infos que je voyais là dépassait de loin celles qu’on donnait habituellement à l’équipe médicale pendant les visites annuelles.

— Carrie Hermann est une agente qui a fini sa formation il y a quelques semaines, mais elle n’est pas encore apte à exercer sur le terrain.

— À cause de son démon ?

La feignasse ne se donna même pas la peine de me répondre. Une fenêtre s’ouvrit sur l’écran sur un paragraphe d’un rapport de premier contact :

Ce matin, la balance affichait 46,7, j’ai perdu presque quatre kilos en deux jours. […] aujourd’hui, je n’ai pas pu me peser à l’heure exigée par le protocole. Je n’ai pas la moindre idée de ce que j’ai fait entre 17 et 21 heures mais je suis sûre que je ne me suis pas endormie, parce qu’il ne reste plus rien dans le frigo.

— Son démon…

— Il la possède comme un démon de type esprit, mais agit sur son corps comme un parasite. Pour être plus claire, il la grignote de l’intérieur, et finit par la posséder quand il a faim. Il semblerait que ce soit amateur de friandises, car il n’attend pas que Carrie perde de poids, ou développe une carence, quand elle limite sa consommation de sucre.

— Encore une. petite. qui va. pas tenir. jusqu’à la trentaine.

Si c’était pas la montre de la feignasse qui parlait, je collerais volontiers une baffe à ce démon. Non, le pire, c’était justement d’entendre ce genre de constat avec la voix d’une machine, vide d’émotion, mais avec des mots que j’aurais pu moi-même aligner.

— C’est vrai que Bianca aussi a l’air fatiguée en ce moment… elle fait bien ses bilans psycho-médicaux ? Elle vient de passer à deux par an il me semble…

— Alice, dis-je, les dents serrées.

La feignasse fit claquer sa langue contre son palais avant de me regarder droit dans les yeux. J’avais oublié à quel point les siens étaient noirs.

— Tu prétends que ce n’est qu’un surnom affectueux pour la taquiner mais je sais très bien ce qui se passe dans ta caboche de vieux fossile. C’est comme tous ces démons avec lesquels tu as pactisés sans jamais leur donner de nom. Leur donner un nom, c’est leur donner une identité. Leur donner une identité c’est les rendre humains. Les rendre humains, c’est t’y attacher. T’y attacher, c’est souffrir au moment où ils disparaitront. Mais, un beau jour, on t’affuble de la compagnie d’une jeune fille bien humaine dont l’existence risque d’être plus éphémère que celle d’un démon et tu ne trouves rien de mieux que de cacher son identité humaine derrière un surnom inspiré par son démon.

— Tu sais pas de quoi tu parles. Elle l’a très bien adopté !

— Très bien, comme ça, vous êtes deux dans le déni.

— Va te faire foutre Angelica.